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Bienveillance et gentillesse : douceurs du coeur

Aujourd’hui, j’ai l’élan de te parler de la bienveillance, qualité morale qui vise le bien et le bonheur d’autrui. C’est un thème qui me tient à coeur parce que je mesure chaque jour combien sa pratique quotidienne me plonge dans un profond bonheur et une sérénité puissante. La bienveillance est mise à l’honneur dans les philosophies orientales. Dans le bouddhisme par exemple, elle fait partie des quatre incommensurables avec la compassion, la joie altruiste et l’équanimité (détachement); les quatre qualités morales à méditer et développer. C’est également une des notions fondamentales du Bushido, le code des principes moraux des samouraïs japonais. Enfin, la bienveillance est aussi une des cinq observances morales à pratiquer dans le Raja Yoga, issu des philosophies indiennes (avec la sincérité, le détachement, l’honnêteté et le contrôle des sens).

Cette qualité morale que les sages nous invitent à cultiver chaque jour, il nous est également proposé de l’étendre… Faire preuve de bienveillance pour les êtres qu’on chérit, cela relève presque de la spontanéité, de l’élan « normal » et facile, en général du moins. Le bouddhisme par exemple nous suggère de l’étendre à tous les êtres que nous rencontrons sur notre chemin, que ce soit furtivement, dans la rue, lors d’un voyage, au travail, … et y compris la nature, les animaux,…  Le Bouddha nous propose de développer la bienveillance, cette habitude à partir du coeur de souhaiter le bonheur et le bien-être, à tout être vivant quelle que soit sa forme. La méditation metta (bienveillance en pali – langue morte indienne), véritable souffle d’Amour sur le Monde, en est un merveilleux exemple. Pensons également à développer cette qualité sans objet, c’es-à-dire sans qu’il y ait de raison particulière, « juste » pour célébrer l’existence de cet Autre.

J’ai pu remarquer que se mettre dans cette disposition bienveillante me permet de devenir très attentive à autrui et ainsi de sortir un peu aussi de cette tendance que j’ai parfois et que j’imagine que d’autres ont, à être focalisé sur « ma » vie, « mes » éventuels problèmes, ce que j’ai envie de changer en moi ou peut-être même les traits que je me reconnais. Pratiquer la bienveillance, c’est une invitation à tourner notre regard vers le Monde. Ce n’est pas du tout un phénomène qui part de la raison, d’une réflexion, d’un processus intellectuel. La bienveillance est un élan du coeur. C’est, en observant l’autre, avoir envie, ressentir l’élan de lui dire des mots réchauffants, de faire quelque chose pour lui , de lui donner quelque chose pourquoi pas ou simplement de le regarder d’une façon particulière avec la pensée « je te vois, merci d’être là »… ou une petite remarque par rapport à quelque chose qu’il a fait et que peut-être personne d’autre n’a vu. J’aime prendre le temps de remercier le travail parfois ingrat de personnes que je croise : la bonne odeur de frais après que la femme de ménage ait nettoyé les bureaux, le nettoyeur de rues,… La bienveillance passe par des choses qui peuvent sembler infimes mais qui créent réellement un vortex très positif.

Ma deuxième constatation conclut que faire preuve de bienveillance est contagieux. L’autre sentant le bienfait d’un petit geste bienveillant, d’un regard porteur, d’une petite douceur du coeur, sent également grandir en lui cette envie d’être à son tour attentif à l’autre et peut-être aussi de te retourner cette attention et de la diffuser autour de lui de façon consciente. Je prends conscience de la puissance de la bienveillance quand je me sens bouleversée par un acte ou une parole qui m’est adressé de cette façon. Je me souviens récemment d’un exemple touchant… Sur Facebook, un échange m’ayant touché, j’exprimais ma tristesse. Tout de suite, une petite dame que je ne connais pas dans la vie « réelle » m’a adressé un message privé pour s’assurer que tout était ok à présent. C’est très touchant et soutenant ce type de petites attentions gratuites qui traduisent l’attention que l’autre porte à votre bien-être. Si simple et tellement bienfaisant! Imagine un monde où chacun pourrait être dans cet élan et cette conscience bienveillante envers l’Autre…

Pour en revenir à ce que j’évoquais un peu plus haut : cette relative facilité à être bienveillant envers les gens que nous aimons et cette invitation du Bouddha à étendre le champ des receveurs. J’ai pu vivre, ces derniers jours le véritable défi qu’est d’offrir cette valeur morale aux gens inconscients ou qui sont peut-être dans des moments difficiles  de leur vie et qui tentent de répondre à leurs besoins avec des stratégies leur faisant tenir des propos difficiles à encaisser ou des actions avec lesquelles tu te sens blessés. Je me suis rendue compte que, face à ces attitudes, comme toujours, j’avais le choix : soit me renfrogner, entamer un film mental rempli de « c’est pas possible d’être aussi râleur, négatif, de pourrir ainsi la vie des autres etc. », soit répondre par l’Amour.

Dans les faits, j’ai pu goûter qu’il était d’abord important, pour moi en tous cas, d’accueillir cette colère et cette tristesse nées du fait que mes besoins d’harmonie, de sérénité et de communication bienveillante ne soient pas nourris. Eviter de les nier, de jouer à la Sainte Delphine qui peut tout gérer avec sagesse, mais leur donner leur juste place pour sentir alors que tout s’apaise en moi. Et, dans un deuxième temps, au lieu de répondre à cet être sur la même tonalité, je choisis de répondre à mon besoin d’harmonie en continuant à faire preuve de bienveillance envers cette personne tout en plaçant mes limites si nécessaire; à faire mon possible, en partant du coeur et non de la tête, donc en étant authentique. Le plus beau dans cette manière de vivre, c’est de constater les effets positifs qui s’ensuivent : l’atmosphère s’est allégée, comme si cet Autre avait eu l’écho de cette bienveillance en son coeur et avait pu s’en servir pour s’apaiser un peu à son tour.

Dans un premier temps, ce n’est peut-être pas toujours aisé de spontanément réagir avec une sagesse infinie et d’envoyer de l’Amour à cette personne qui peut-être a tenu des propos avec lesquels tu t’es senti blessé.e. Mais c’est possible, dans un deuxième temps, après avoir pris du recul, s’être détaché et avoir accueilli tes émotions, de choisir… Est-ce que je choisis d’entretenir cette voie négative, renfrognée et de renchérir ou est ce que je propose autre chose et je vois ce que ça donne…

Avant de clôturer, j’ai également envie de nous rappeler que, comme pour la compassion, la bienveillance n’est complète que si nous devenons capables d’en faire preuve à notre égard également. Mais c’est un sujet qui demanderait encore plusieurs pages de développement…

Invitation est donc lancée pour que, chaque jour, nous aiguisions notre observation bienveillante et puissions la répandre sur le Monde, pas à pas…

Terminons avec cette formule, présente dans de nombreux soutras :

Je demeurerai en faisant rayonner un esprit de bienveillance.

Dans un quartier de l’univers, et de même pour le second quartier, le troisième et le quatrième.

Et de même au-dessus, au-dessous, à travers.

Et partout dans sa totalité.

Envers chacun comme envers moi-même.

Je demeurerai faisant rayonner en tout lieu de l’univers,

Avec une esprit imprégné de bienveillance,

Large, profond, élevé, incommensurable

Sans haine et libéré de toute inimitié.

Une envie de partage?